Partir pour mieux revenir: rencontre avec Patric Mondou de Gameloft

On entend souvent parler d’histoires de développeurs qui ont quitté un grand studio de jeux vidéo pour partir leur propre studio indie.

Ce qu’on entend moins souvent, toutefois, ce sont les histoires de développeurs qui décident de revenir au bercail.

C’est le cas de Patric Mondou, designer de jeux qui a quitté Gameloft pour fonder son propre studio… pour finalement revenir chez Gameloft.

On l’a rencontré pour en discuter.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Patric-Mondou.jpg.
Patric Mondou

Comment devenir développeur de jeux vidéo en 1000 étapes complexes

Patric Mondou n’est pas très vieux. Pourtant, il est issu d’une époque qui semble aujourd’hui lointaine, lorsque des études en jeux vidéo n’existaient pas.

Il a donc étudié en développement web… pour se rendre compte que ce n’était pas vraiment son domaine: « J’avais beaucoup de difficultés avec le fait de gérer des clients sur une base régulière, c’était un domaine qui était très très stressant, qui était particulièrement difficile au niveau de la gestion des attentes clients ».

Il s’est donc dirigé en recherche dans le milieu universitaire, ce qui a fini par le mener chez Gameloft. Il commence comme Technical Game Designer, « ce qu’on pourrait traduire dans d’autres studios comme étant soit un scripteur ou un level designer ».

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est IMG_8709-1-1500x1000.jpg.

Le premier jeu sur lequel il travaille comme employé temps plein est Modern Combat 2: « C’est un shooter qu’on voulait le plus près possible d’une expérience de shooter console mais sur iPhone. À l’époque, ça roulait sur le iPhone 3G! Nos graphiques ressemblaient un peu à ce qu’on retrouvait sur la Nintendo 64! »

Voler de ses propres ailes

Malgré qu’il a du plaisir chez Gameloft, Patric Mondou se met éventuellement à rêver à d’autres horizons: « En 2014, j’étais entre deux projets chez Gameloft, et ça me trottait dans la tête depuis un petit bout de temps d’aller développer des jeux consoles plus orientés vers la famille. Mon background de gamer à l’époque, ce qui venait me chercher, c’était beaucoup les jeux de la Nintendo […] des jeux fantastiques qui viennent piger dans l’imaginaire.

C’était pas nécessairement dans mon plan de carrière de fonder une entreprise, mais j’ai eu une opportunité: un ancien collègue d’université, Louis-Félix Cauchon (président de la Guilde des développeurs de jeux vidéo du Québec) avait en tête de démarrer un studio. Après discussions, il s’est avéré que la vision du jeu qu’on voulait produire était assez proche ».

Patric quitte donc Gameloft pour co-fonder son propre studio, Borealys Games. Lui et son complice se tournent vers le socio-financement pour ce premier jeu: « On a fait un kickstarter qui a super bien été, c’était à l’époque le record pour un jeu au Canada! »

Ce jeu, c’est Mages of Mystralia, un jeu qui rencontre un grand succès d’estime et commercial pour un premier jeu d’un studio.

Malgré les difficultés inhérentes au développement d’un jeu indie (ou d’un jeu vidéo en général, pour être honnête), l’équipe de Patric Mondou réussit à publier son jeu sur toutes les consoles.

Disons que ça boucle la boucle quand on sait que Patric a quitté Gameloft en espérant développer des jeux nintendo-esques.

Retour au bercail

Alors que le projet Mages of Mystralia tire à sa fin, Patric se retrouve dans la même situation qu’en 2014, à son départ de Gameloft: « On était au début d’un nouveau projet, et j’ai eu le goût de revenir à un studio de taille importante. C’est là que mon départ a commencé à s’organiser. »

Pourquoi vouloir retourner à un plus gros studio? Un peu pour les mêmes raisons qui font que Patric a décidé de quitter le développement web; la gestion des attentes des clients ne fait pas partie de ses tâches favorites.

« Quand on fonde une entreprise, on n’est pas réellement notre propre patron non plus. Tous les producteurs de produits culturels vont te le dire: les patrons, c’est les clients, c’est les gens qui achètent ton jeu, et les gens qui vont te prêter de l’argent pour le faire. »

Et les gens qui te prêtent des sous sur Kickstarter sont spécialement exigeants; puisqu’ils ont investi de l’argent de leur poche, ils ont tendance à suivre le développement de très près.

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, Patric Mondou trouve que la structure d’une grande entreprise lui donne une plus grande liberté, d’une certaine façon: « [l’environnement des gros studios] nous permet d’expérimenter un peu mieux. Pas plus facilement, mais mieux, parce qu’on a une plus grosse structure d’entreprise qui nous permet d’aller de l’avant et de faire quelque chose de nouveau, tout en restant près de notre produit et de l’équipe. »

Et surtout, il peut se concentrer sur ce qu’il aime le plus, faire des jeux: « Il y a beaucoup des choses que je devais faire chez Borealys pour permettre de faire survivre le studio, les tâches connexes, j’en avais beaucoup. Ici, il y a toute une structure qui est là pour nous permettre de faire des jeux. »

Au final, Patric ne regrette rien; il est fier de ce qu’il a accompli chez Boréalys, mais il croit également qu’il bénéficie de l’expérience qu’il a acquise: « je pense que ça fait de moi un meilleur développeur de jeu. J’ai une meilleure compréhension des besoins de nos parties prenantes dans un projet. »

Après tout, il a touché à tout pendant son exil: « Une des raisons qui me fait penser que c’est un bon fit mon retour chez Gameloft, c’est que j’arrive comme quelqu’un qui a fondé une entreprise, qui a été chercher plusieurs milliers voire des millions pour développer son produit, qui a dû faire sa propre communication, son PR, son marketing, bref, j’ai vu le pipeline de production de A à Z. »

Gameloft, le géant de l’ombre

Gameloft est un nom qui n’est pas nécessairement familier pour tous les joueurs. Pourtant, c’est un géant parmi les studios de jeux montréalais; juste en 2019, ils ont embauché plus de 175 nouveaux employés!

L’entreprise, qui se spécialise dans les jeux mobiles (et sur la Switch), a travaillé avec les plus grandes franchises du monde, de Disney à Mattel en passant par Ferrari et Lego.

Pour avoir visité les locaux, c’est aussi le genre d’endroit cool où on offre cours de yoga et 5 à 7 arrosés. Et une table de baby-foot, évidemment.

D’ailleurs, si vous souhaitez suivre les traces de Patric Mondou, l’entreprise est en ce moment en période d’embauche. N’hésitez pas à aller faire un tour!

Après tout, comme le dit Patric Mondou, une entreprise comme Gameloft présente de grands avantages pour les passionnés: « Gameloft est une entreprise qui est très réactive aux nouvelles technologies et aux nouvelles plateformes. Ce que ça m’assure de travailler avec Gameloft, c’est que je risque d’être à l’affût et à l’avant-garde de toutes ces nouveautés-là! »