XCOM ou X-Com est une des séries de jeux de stratégie qui a fait le plus spectaculaire retour sur scène de l’histoire des jeux vidéo. Son style de tour par tour en combat avec un système en temps réel hors-combat la rend unique et devient le point de référence pour les jeux du même genre. Pourtant, en regardant la popularité que le jeu connaissait avant et qu’il connaît aujourd’hui, il est difficile de comprendre ce qui a bien pu tuer la franchise en premier lieu. Dans ce deuxième chapitre, nous explorons les faux pas de la série qui ont mené à sa chute.
X-Com: Terror from the Deep (TFTD), sorti en 1995 pour le PC est la suite directe de X-Com: Ufo Defense (Ufo: Enemy Unknown). 40 ans après l’assaut sur Cydonia et la destruction de la base alien, un émetteur toujours actif éveille une puissance ancienne des océans. Le vaisseau-astéroïde T’leth qui s’est écrasé 65 millions d’années plus tôt, causant l’extinction des dinosaures, transportait un cousin éloigné des Sectoids du premier titre : les Aquatoids. À nouveau, en temps que commandant des forces X-Com, vous devrez combattre les extra-terrestre pour sauver le monde.
Plus ça change, plus c’est pareil
En aucun cas ne vais-je affirmer que Terror from the Deep est un mauvais jeu. Le titre était bon en soi si on aimait le gameplay déjà établi par le premier jeu. Bénéficiant de la popularité des romans de science-fiction de H.P. Lovecraft et de Jules Vernes, un nouveau regard fut lancé sur ce qu’est une menace extraterrestre dans les jeux vidéo et les moyens pour la contrer.
Mais c’est là tout ce que l’on peut dire de positif qui n’a pas déjà été dit sur X-Com: Ufo Defense. MicroProse voulaient un nouveau jeu en six mois, alors c’est tout ce qu’ils ont eu. Excepté quelques changements mineurs à l’interface de jeu, tout à été soigneusement recyclé et reformulé dans un emballage différent aux saveurs sous-marines. Les armes ont été entièrement remplacées par des versions aquatiques et de nouvelles pour le combat rapproché font leur apparition. Concernant les missions, le format est identique à savoir : les assauts sur les vaisseaux, les bases et les sites de terreur. Même la mission finale et la progression de recherche qui y mènent sont identiques. Une mission supplémentaire tenant d’un mélange de site de terreur et de base extraterrestre a été ajoutée avec pour objectif de détruire un artefact de communication alien.
Julian Gollop, designer de la série, avoue lui-même avoir passé très peu de temps sur Terror from the Deep et davantage sur le titre X-Com: Alliance qui fut par la suite annulé.
Bémols
Pour certains, cela peut représenter un problème, mais pour d’autres, c’est un nouveau défi ; le jeu est brutalement plus difficile pour les débutants que ne l’était le premier titre. N’étant pas très habitués au combat sous-marin, il est normal que l’équipement humain ne fonctionne pas aussi bien sous l’eau que sur terre. Toutes les armes équivalentes souffrent d’une façon ou d’une autre d’une diminution de statistiques que ce soit la précision, les unités de temps nécessaires ou même la capacité de chargeur. Le jeu se ratrappe par les avancées technologiques à déverrouiller en jeu, mais cela peut créer une frustration chez les joueurs qui souffrent d’un nouvel handicap dans une série de jeu déjà très difficile.
Ce qui est venu vraiment gâter les choses, c’est la direction que le scénario a emprunté. Détruire une base alien sur Mars cause très peu d’impact sur la planète rouge, mis à part créer un nouveau cratère. Détruire une base sur Terre et décimer une ancienne civilisation sous-marine représente toutefois un impact majeur sur l’écosystème de la planète. La fin de Terror from the Deep signifie le début de l’Apocalypse.
C’est en 1997 que sort X-Com: Apocalypse. « Enfin ! » pourrait-on dire, en espérant que le jeu ait changé. Sans déroger au modèle de base, ce nouveau titre s’est concentré sur un modèle plus réduit de la Geoscape, la Cityscape. En effet, les événements de Terror from the Deep ont laissé la planète en tel désarroi que la civilisation s’est concentrée dans de rares mégalopoles. Le jeu se déroule dans la ville de Mega Primus, bâtie sur les ruines de Toronto. Plusieurs décennies après la destruction de T’leth, des portails font irruptions dans la ville et font apparaître des extraterrestres sur Terre. Le projet X-Com est réactivé et financé par la ville. Beaucoup plus ambitieux que ses prédécesseurs, Apocalypse présente un système politique complexe et un nouveau système de gestion pour les troupes X-Com.
Politique
Le titre de MicroProse comprend plusieurs factions politiques et marchandes dans la ville. En principe, le mieux est de rester en bons termes avec ces factions, car ces organisations sont les fournisseurs d’armes, de véhicules et de matériaux généraux. Afin de conserver de bonnes relations avec ces factions, le X-Com doit s’activer à défendre ses biens et s’assurer qu’il n’est pas infiltré par l’ennemi. Au contraire, de mauvaises relations mènent à l’impossibilité de bénéficier des services offerts par la société. Par exemple, si X-Com se froisse avec Nanotech, l’achat de med-kits deviendra impossible. La pire de ces situations probables serait l’aliénation du gouvernement, votre seul soutien financier, qui mènerait votre organisation à devoir piller les autres pour pouvoir subsister, et ce avec toutes les retombées négatives que cela entraîne.
Certaines autres organisations sont des syndicats du crime. Ces derniers lancent des raids qui ont des retombées négatives sur les factions. Répliquer à ces raids permet de récupérer de l’équipement et d’améliorer vos relations avec les corporations attaquées. En contrepartie, intervenir vous crée des ennemis puissants, en plus des aliens, qui risquent de lancer des raids sur vos bases.
Système
Un des changements majeurs dans la série apporté par ce jeu est le combat en temps réel. Avant de commencer le combat, le joueur décide s’il veut diriger ses troupes en temps réel ou en stratégie au tour par tour. Les deux modes de jeux ont des avantages et des inconvénients. Par exemple, le combat en temps réel permet difficilement d’approcher un ennemi et d’utiliser des armes de combat rapproché, puisque les réactions sont également en temps réel. Il en va toutefois de même pour l’ennemi qui ne peut plus s’approcher de vos unités sans déclencher automatiquement une réplique. Choisir son type de combat permet d’accéder à un nouvel éventail de stratégies jusqu’alors inexplorées par la série.
De plus, les joueurs bénéficient d’un nouvel arsenal de véhicules permettant aux troupes de se déplacer plus rapidement dans la ville de Mega Primus. Tous les véhicules peuvent être armés afin d’intercepter les véhicules ennemis et un petit équipage peut lui être attribué selon le véhicule.
Un autre changement est la difficulté adaptative à l’extérieur du choix de difficulté originel. Vendu à l’origine comme étant une intelligence artificielle évolutive, le système est en fait seulement un ajustement de la difficulté du jeu par rapport aux résultats obtenus. Par exemple, beaucoup de résultats positifs conduisent à des raids plus fréquents avec des armes plus puissantes tandis que des résultats négatifs ralentissent le temps de réponse des extra-terrestres.
Un potentiel perdu
À l’origine, le jeu devait comporter des événements politiques en cours de partie dans le but d’animer la ville et rendre ce système encore plus complexe. Toutefois, le manque de communication et le passage de MicroProse entre les mains de plusieurs éditeurs sont venus réduire la quantité d’éléments d’intrigue à son strict minimum.
Le manque de communication est venu de la séparation des tâches entre Mythos Games et MicroProse. Pendant que Mythos Games s’occupait du développement du système de jeu, MicroProse devait s’occuper de la partie artistique. Ces derniers avaient quelque peu la folie des grandeurs et concevaient des monstres et modèles incroyablement détaillés pour le jeu. Toutefois, le volume de ces modèles mélangé aux contraintes d’espace dans le jeu rendait toutes ces démarches inutiles lors de la miniaturisation des images. Les figures se brouillaient et étaient difficile à reconnaître. Chaque artiste ayant travaillé sur le projet est venu imposer son style personnel. Cela se reflète grandement sur la cityscape. Les bâtiments sont confus, parfois colorés, d’autres fois ternes et sans points de référence afin d’identifier ce qu’ils sont supposés représenter.
En 1998, le titan du jouet Hasbro achète 91% des actions de MicroProse et devient actionnaire majoritaire par le biais de sa filiale Hasbro Interactive. Les jeux X-Com, qui étaient déjà produits sous pression au sein de MicroProse en ont souffert grandement. Les changements de sociétés ont été directement responsables de l’annulation des deux titres les plus attendus de la série : X-Com: Alliance (alors que MicroProse est racheté par Infogrames) et X-Com: Genesis en plus d’avoir forcé la sortie de titres plus médiocres tels que X-Com: Interceptor et X-Com: Enforcer.
Interceptor
L’enfer est pavé de bonnes intentions. X-Com: Interceptor se voulait un jeu de simulation de combat spatial avec une dimension de gestion des avoirs de l’organisation. Le jeu fut très mal reçu par la communauté et par les fans, notamment pour ses références culturelles de mauvais goût qui venaient enlever du sérieux au jeu. Situé entre TFTD et Apocalypse, le jeu se passe dans une autre section de l’univers appelée The Final Frontier, une région de l’espace riche en ressources qui manquent cruellement sur Terre. Toutefois, un vieil ennemi prend également un intérêt dans cette zone et décide de venir vous barrer la route.
Je n’ai rien contre les jeux de simulation de combats spatiaux, mais si vous espérez une expérience X-Com authentique, retournez dans les jeux précédents. Le jeu en soi est passable si on ignore les références de culture populaire insupportables. Les contrôles sont bons (si vous utilisez un accessoire comme un joystick) et la structure de bases et de recherche est bien établie comme dans les jeux précédents. Le jeu ne s’est tout simplement pas démarqué et a sombré dans l’oubli, probablement pour le meilleur.
Enforcer
Après plusieurs années de travail, le projet X-Com: Genesis fut mis à mort. Le projet Genesis était censé amené la série vers le jeu de tir à la première personne avec une dynamique de gestion de bases similaire aux jeux précédents. Hasbro Interactive, alors propriétaire de MicroProse, a tout de même voulu capitaliser un peu sur les ressources déjà établies pour Genesis et X-Com: Enforcer en est le résultat. Oubliez tout ce que vous savez sur X-Com. Enforcer est un jeu de tir à la troisième personne où vous incarnez un robot de classe ENFORCER. Votre tâche est d’exterminer toute forme de vie extra-terrestre par la simple force brute.
Aucune stratégie n’est nécessaire, il faut simplement foncer dans le tas. Enforcer est un jeu agréable si vous avez quelques minutes à perdre et envie de dégommer des extra-terrestres. Les ennemis laissent tomber des crédits lorsqu’ils meurent. Ces derniers sont nécessaires en fin de mission pour faire avancer des recherches qui améliorent l’ENFORCER. Des augmentations sont cachées dans les niveaux et essentielles pour déverrouiller de nouvelles recherches et accéder à de nouvelles fonctionnalités.
Cependant, plusieurs bémols sont à noter. Premièrement, la caméra de jeu est fixée dans un angle étrange qui vous fait d’avantage regarder le sol causant une très désagréable impression, puisque le jeu possède son lot de pentes ascendantes. Deuxièmement, le manque de profondeur du jeu rend les objectifs répétitifs. Détruire 12 téléporteurs, tuer tous les aliens, même les missions demandant de protéger quelques civils immobiles sont en fait des missions de destruction d’une façon ou d’une autre. Finalement, si vous voulez jouer au plus bas niveau, attendez vous à une grande déception. Une partie entière du jeu n’est pas accessible en deçà du niveau normal. Cependant, tout n’est pas perdu puisque votre ENFORCER conserve toutes ses améliorations à n’importe quel niveau, le seul moyen de perdre ses améliorations étant de se créer un autre robot ENFORCER.
Ainsi pris fin la première version de la série X-Com. Toute la différence est faite lorsque les projets sortent inachevés ou à la hâte. Ces échecs ont causé la perte d’une des plus grande séries de jeu de stratégie pendant 10 ans. Heureusement, Firaxis Games reprendra le flambeau en 2012 pour recréer la série, plus forte que jamais.