Depuis une décennie, la série Disgaea est une figure de proue du genre stratégie et jeu de rôle (SRPG). Nippon Ichi Software fête 10 ans de succès avec une suite directe au jeu original. Laharl, Flonne et Etna reprennent du service, eux qui se limitaient à quelques présences éphémères dans les précédents volets, laissant les feux de la rampe à d’autres personnages. Presque calqué sur le titre original, Disgaea D2 sait-il nous charmer encore après tout ce temps?
Retour au bercail
Ça va mal dans le Netherworld. Laharl, qui détient le titre d’Overlord – le maître des démons en quelque sorte – ne se fait plus respecter dans son monde. Épaulé d’Etna et de Flonne l’ange déchue, le personnage tente de découvrir pourquoi son règne est loin de rallier les troupes. Le trio découvre bien vite que les démons détestent Laharl, qu’il est incompétent et indigne de son titre malgré le sang paternel du défunt King Krichevskoy qui coule dans ses veines. De fil en aiguille, le joueur réalise que ce manque de respect a des ramifications beaucoup plus importantes, jusqu’à impliquer le monde des anges Celestia. Car le Netherworld est également proie à un problème alarmant : des fleurs Yuie poussent partout, mais personne ne sait comment et surtout pourquoi.
Toujours aussi légers et humoristiques, les nombreux dialogues ajoutent énormément à l’expérience. Quand Laharl ne prend pas la parole de son air hautain et narcissique, c’est Etna qui joue les durs à cuire. Flonne, fidèle à elle-même, préfère le rôle de diplomate. Ces personnalités, on les connait que trop, même si Laharl et Etna éprouvent à l’occasion des émotions révélant leur côté sensible de démons. Le scénario m’a semblé plus faible que l’original : l’intrigue principale se conclut de façon prévisible, et peu de surprises sont au menu. Mais qui joue à Disgaea pour l’histoire, vous me direz?
Aye aye, Dood!
D’un point de vue purement gameplay, Disgaea D2 rassemble tous les éléments gagnants de la recette originale dans un tout délectable. Les unités se déplacent de cases en cases au tour par tour sur les différents terrains découpés en grilles, exécutent des commandes simples et éliminent les ennemis. Cette fois, lorsqu’une de vos unités est en mode défense, elle peut bloquer un coup porté à un allié avoisinant si son degré d’amicalité est suffisamment élevé. Dans un même ordre d’idées, des unités qui « s’aiment » auront plus de chances de porter des coups combinés ou supplémentaires. Cette tactique porte fruit particulièrement avec les héros équipés d’arcs et de fusils.
Une de mes principales déceptions avec Disgaea D2 est l’absence cruelle de nouveautés. Les classes, les monstres, les niveaux, l’Item World, tout semble copié-collé. Pour un nouveau joueur, pas de problème, mais les fans de longue date s’attendent à un minimum de fraicheur. Il est vrai que la complexité des unités a été améliorée grâce à un système de compétences poussé, mais en résumé l’expérience est trop proche des autres jeux dans la série. Ce n’est pas mal en soit : toutes les séries populaires ont leur lot de concepts phares. Toutefois, ici, ces concepts dérogent rarement de ce qui a été établi. Après 10 ans, je m’attends à des créatures jamais vues, des classes inédites, mêler les cartes quoi. Surtout en sachant que je devrai terrasser des milliers de monstres avant de me frotter au contenu avancé du jeu. De voir et revoir les mêmeszombies, papillons, mages et j’en passe, c’est lourd.
Ceci étant dit, la base du jeu demeure aussi solide que par le passé. Les attaques s’enchaînent et augmentent la jauge bonus qui, en retour, vous donne des objets une fois le niveau complété. Les nouvelles animations d’attaques spéciales sont incroyables, et j’aime pouvoir les annuler avec une seule pression de bouton. Croyez-moi, après quelques heures, ce raccourci vous évitera bien des maux de tête. À moins d’être une sorte de masochiste de l’animation…
It’s over 9000!
J’ai senti tout au long de mon parcours dans Disgaea D2 que les développeurs étaient menottés par l’historique de la franchise. Un seul nouveau type d’arme : le livre. Aucune fonctionnalité en ligne, contrairement à Disgaea 3. Le strict minimum en matière d’innovation. Pourtant, ce n’est pas le genre qui manque d’opportunités. Je suis fan de Growlanser et parfois j’aimerais voir de véritables conséquences dans Disgaea (pas seulement les mauvaises fins alternatives), des missions imprévisibles en constante évolution. Au lieu de cela, nous avons droit à un produit très conservateur tant sur le fond que sur la forme.
À mes yeux Disgaea D2 n’est pas à la hauteur des attentes. Il serait cependant erroné de penser que le jeu n’a pas de qualités : les graphismes autrefois limités à de vulgaires sprites 2D sont d’une haute définition alléchante, la musique endiablée donne le rythme, les temps de chargement sont quasi inexistants et pour les mordus de la série il y a une tonne de contenu post game. Je dois aussi avouer que mon expérience a été passablement entachée par de multiples crash, du jamais vu de mon côté avec un titre de la série. J’ai recherché et ça ne semble pas un cas isolé, donc soyez avertis que Disgaea D2 n’est pas fiable, du moins pas autant que les autres.
Verdict
Disgaea D2 est une célébration de la série. En tant que suite directe au premier opus principal, je le classe parmi les moins bons jeux de la série. Je n’irais pas jusqu’à le qualifier de navet, car la qualité est tout de même au rendez-vous. En tant que fan de longue date, j’estime que Nippon Ichi Software a raté une occasion de hausser la barre. Au contraire, le jeu m’a semblé moins ambitieux, peut-être dans un souci de conformité avec le titre original. Il est bon de revoir Laharl et les autres, mais leur seule présence ne suffit pas à créer un univers dans lequel nous prenons plaisir à voyager. Un bel effort qui manque de punch, de piment, un peu trop prévisible et ancré dans la tradition.