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Destiny : notre critique

Au fil des années, le développeur Bungie s’est taillé une place enviable dans l’industrie d’abord sur PC et Mac avec notamment la série Marathon, mais aussi l’excellent jeu de stratégie Myth et sa suite, Myth II: Soulblighter. Mais c’est surtout la franchise culte Halo qui a catapulté ce studio dans la stratosphère vidéoludique. Après avoir travaillé sur cette propriété intellectuelle pendant une dizaine d’années, il était temps de tenter un nouveau grand coup, un projet encore plus ambitieux dont le développement futur serait planifié sur une décennie. Faites place à Destiny, un jeu qui alimentera beaucoup de discussions dans les semaines à venir. Après avoir combattu les Ténèbres avec mon Gardien, je vous livre mes impressions d’un des plus importants jeux de l’automne.

Faire face à son destin

D’emblée, les attentes étaient élevées face à Destiny. De la part d’un studio aussi réputé que Bungie, un studio avec plus de 20 ans d’expérience dans l’industrie, peu de gens s’attendaient à une déception. Avec Halo comme assurance anti-navet et une campagne marketing à grand déploiement, comment un produit de si haute voltige, du moins en apparence, pourrait ne pas séduire?

Dans Destiny, vous incarnez un Gardien dont la mission est de protéger la Terre des Ténèbres, un terme vague pour décrire une force extra-terrestre inouïe capable de détruire tout sur son passage. Se dresse devant ce fléau galactique votre personnage en trois variations (classes) : Arcaniste, Chasseur ou Titan, lesquelles répondent aux trois archétypes de base d’un jeu de rôle avec plus ou moins de précision. L’Arcaniste utilise un peu de magie, le Chasseur est habileté avec les fusils de sniper et le Titan est une machine à tuer avec de l’armure à revendre. Chaque classe possède son propre arbre évolutif. Après avoir gagné un niveau, le personnage peut choisir une habileté et l’utiliser. J’ai été déçu de la simplicité de ces arborescences : au lieu de donner des choix, il ne suffit que d’activer les pouvoirs la plupart du temps. Par exemple, avec le Chasseur, vous pourrez utiliser la grenade de base ou un autre type de grenade à tête chercheuse.

La complexité ne se reflète qu’une fois le niveau 15 atteint, à ce moment vous débloquez la sous-classe et ses pouvoirs additionnels. Dans son exécution, Destiny a l’apparence d’un MMO sans en être un, c’est-à-dire qu’une partie des missions vous sont fournies par des PNJs et les autres sont déverrouillées au compte-gouttes. La progression est lente et fastidieuse, un défaut notable du genre MMO et son grind inévitable. L’histoire en tant que tel n’est pas du tout engageante. Les dialogues rendus par Peter Dinklage (Game of Thrones) sont d’une telle morosité qu’il est difficile d’accrocher au scénario. Et quand on passe par-dessus cet élément, nous nous retrouvons avec des missions tout ce qui a de plus commun, amorphe, artificiel. En effet, les objectifs ne varient que peu et consistent la plupart du temps à éliminer des vagues d’ennemis puis leur chef. Rares sont les missions où les ennemis ont été positionnés stratégiquement et où il faut réellement penser avant d’attaquer. Malgré l’immensité de certains environnements, les objectifs sont plutôt linéaires, sans être des corridors non plus.

Une destinée incertaine

Au niveau de l’intelligence artificielle, j’ai été agréablement surpris. Les ennemis battent en retraite, esquivent, se donnent des ordres, se protègent et tentent de vous piéger avec quelques tactiques de combat. En pleine fusillade, il se peut qu’un ennemi décide de foncer sur vous pour tâcher de briser votre attaque, par exemple. Dans un autre cas vécu à de multiples reprises, la créature plongera pour éviter la grenade que vous lui aviez lancée. Si le bestiaire de Destiny est plutôt intelligent, je ne peux en dire autant de son game design en général. Pour un jeu qui se veut partiellement axé sur la découverte d’items et la personnalisation de son Gardien, il me semble que ces aspects ont été négligés. Peu d’adversaires laissent tomber des objets, les coffres sont quasi inexistants et le sentiment de progression en est entaché. Je me souviens encore des boss de missions spéciales (Strike) qui ne donnent presque rien malgré les combats intenses requis pour les terrasser.

Concernant la personnalisation proprement dite, les options ne sont pas légion. Pour moi l’impossibilité de nommer son Gardien autre chose que son nom d’utilisateur du réseau en ligne est une preuve parmi tant d’autres de négligence atroce à ce sujet. Au moins, l’équipement vient un peu équilibrer les choses pour que son personnage sorte du lot un peu. Ma critique la plus sévère envers Destiny est la suivante : j’ai l’impression de lire un mauvais roman. En temps normal, si les premiers chapitres ne m’accrochent pas, j’arrête. Mais selon la philosophie de Bungie, le « vrai » jeu débute au niveau maximal, soit 20. Alors dans ce cas, pourquoi ne pas faire en sorte que le contenu « débutant » soit à la hauteur?

J’ai vraiment eu l’impression que le contenu n’était pas amusant, bien au contraire. Trop de répétition, de problèmes que j’attribuerais à des studios inexpérimentés si ce n’était que le développeur a un pédigrée important en la matière. Des choses frustrantes comme de forcer les joueurs à posséder une connexion Internet, une réalité de plus en plus présente dans l’industrie et surtout, nocive. Là où le bât blesse particulièrement, ce sont avec les fonctionnalités sociales. Destiny se veut une expérience multijoueur. Pourtant, l’impossibilité de discuter avec d’autres joueurs outre les fonctionnalités réseau des fabricants m’a vraiment déplu. Il me semblait anormal de ne pas pouvoir taper un message à l’écran ou discuter au micro alors que je me trouvais au sein d’une équipe aléatoire. Le jeu est donc pas du tout aussi coopératif qu’on pourrait le penser avec l’isolement des joueurs dans un univers qui peine à se démarquer des autres produits dans sa catégorie.

Quand le destin frappe

D’un côté un peu plus positif, je retiens la musique géniale composée entre autres par Martin O’Donnell et des graphismes plutôt convaincants avec une panoplie de détails dans l’environnement. La fluidité de Destiny est aussi exemplaire; pour un jeu seulement disponible en ligne, Bungie a évité les problèmes liés aux serveurs, une grosse commande en soi. Les ralentissements ne sont pas fréquents, l’action se déroule à vive allure. Toutefois, ce sont là des choses normales voire attendues de la part d’un jeu au budget monstre, donc je ne vais pas passer trop de temps à féliciter ce que je considère obligatoire de la part des développeurs. Pas quand l’ensemble n’est pas du tout à la hauteur des promesses.

Le matchmaking est un des pires à ma connaissance, tout à fait aléatoire et impossible de choisir ses cartes favorites (en multi) donc vous êtes à la merci du hasard. Les temps de chargement sont inexcusables et servis en trois étapes : aller en orbite à son vaisseau, choisir une mission et attendre une fois de plus, un problème soulevé lors de la bêta qui a été complètement ignoré par Bungie. Mon problème avec Destiny est aussi intimement lié à son budget : environ 500 millions de dollars pour le seul premier jeu et je peine à les trouver dans la production finale. Je sais qu’une majeure partie de ce budget faramineux a été investi en publicité. Je sais aussi qu’un jeu de qualité peut ne pas nécessiter un demi-milliard de fonds pour plaire.

Certains me jugeront trop critique, jamais content. À quoi je réponds : Activision vend Destiny comme étant le jeu de l’heure, alors que c’est un jeu médiocre. Un loot passable, des boss éponges nécessitant trop de temps à tuer, une personnalisation limitée, je ne répèterai pas toutes les fautes soulignées dans cette critique, en revanche je veux vous conscientiser au fait que la liste est longue. Si vous n’avez pas d’amis en ligne, autant oublier ce jeu car tout est basé sur les équipes. Oui, vous pouvez compléter les missions seul et croiser d’autres Gardiens. Cependant, l’expérience est beaucoup moins amusante ainsi. Puisque les possibilités de communication sont archaïques pour un jeu de notre génération, même en équipe l’expérience n’est pas au top. Comme je le pensais après avoir goûté à la phase de test bêta cet été, Destiny est un jeu au potentiel énorme. Malheureusement, Bungie n’a pas su maximiser le contenu de son jeu.

Pour un studio aussi prestigieux, plusieurs des fautes dans Destiny pourraient être attribuées à l’inexpérience alors que c’est tout le contraire. Les développeurs avaient tout le temps nécessaire pour ajouter des fonctionnalités de base (communication, échanges d’objets, etc.), plus de donjons sans recycler les mêmes zones et ne pas restreindre le plaisir au end-game. Et encore, le seul Raid prévu est bloqué jusqu’à la semaine prochaine même si plusieurs joueurs ont atteint le niveau maximal dès le premier jour. Je vois mal comment Destiny conservera sa popularité alors que son contenu a déjà été exploré en grande partie.

Certes, deux expansions (DLC) sont prévues à court terme, mais sans autres mises à jour gratuites le jeu va s’essouffler rapidement. Je ne vois pas l’aspect multijoueurs comme des plus attirants tant et aussi longtemps que le matchmaking demeurera catastrophique. Destiny me rappelle un peu Diablo 3 en ce sens que le jeu avait un potentiel évident, mais il avait fallu attendre l’expansion Reaper of Souls avant de vraiment retrouver l’essence de la série. Ici ce n’est pas tout à fait identique car Bungie travaille avec une nouvelle franchise, mais le parallèle tient la route. Je crois sincèrement que Destiny sera un meilleur jeu dans un an avec la sortie d’expansions et, je l’espère, de nombreux correctifs.

Verdict

Destiny est l’exemple parfait d’une nouvelle franchise prometteuse qui n’arrive pas à forger sa propre identité dans un marché saturé de shooters. Avec des systèmes de jeu peu convaincants et une pléiade de problèmes tant sur le fond que la forme, cette méga production nous laisse sur notre faim. Malgré sa bonne fluidité, ses graphismes accrocheurs et sa trame sonore mémorable, Destiny peine à convaincre sur le plan du loot, des missions, de la narration, de l’exploration et de la personnalisation.

Bourré de temps de chargement entre les missions, de fausse profondeur évolutive des Gardiens et de promesses non tenues, le jeu s’avère une déception surtout si vous vous attendez à un meilleur Borderlands croisé à un Mass Effect. Destiny est un jeu de science-fiction tout ce qui a de plus calqué, peu original dans l’ensemble et encore moins innovateur. Je sais que certains vont me dire qu’ils apprécient, que j’exagère, mais il ne faut pas oublier ce que Bungie souhaite créer avec cette franchise : une saga échelonnée sur 10 ans. Je vois mal comment ils vont y arriver avec un produit aussi peu évolué à presque tous points de vue

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