Il y a 25 ans, Super Mario Bros. Le Film sortait au cinéma. L’occasion pour nous de revenir sur cet échec commercial et ce désastre cinématographique.
Super prémices
Débuté en 1990 lorsque Nintendo vend les droits d’exploitation pour la maigre somme de deux millions de dollars au studio Lightmotive afin de capitaliser sur la popularité grandissante de sa mascotte, le projet de long métrage Super Mario Bros. n’a pas été le plus simple à concrétiser. Même si The Wizard, Vidéokid en France et L’enfant génial au Québec, tenait plus de la publicité déguisée, ce n’était pas la première fois que Nintendo utilisait sa franchise dans un film. Par contre, c’était la première fois que le long métrage porterait sur une licence elle-même en faisant le tout premier film tiré d’un jeu vidéo. Avec le visage instantanément identifiable et la notoriété de Mario, que pourrait-il bien mal se passer? De nombreuses choses…
Supers acteurs
Le tout premier script offrait une vision crue de l’univers de Mario sans pour autant se restreindre au scénario limité du jeu. Ceci plait à Nintendo désireuse de découvrir sa franchise à travers un nouveau prisme.
Au départ Dustin Hoffman, oscar du meilleur acteur pour Rain Man en 1988, s’était proposé pour ce rôle mais il est recalé par les producteurs qui jugent qu’il n’avait pas le bon profil. La firme japonaise quant à elle souhaitait voir Danny DeVito mais après lecture du script, ce dernier refuse.
Le prochain acteur à être approché est Tom Hanks qui accepte l’offre initiale pour cinq million de dollars. Mais réflexion faite, Nintendo et les producteurs décident qu’un acteur comique n’est pas le meilleur choix pour leur film. De plus, Hanks n’était pas au summum de sa carrière à cette époque. Il n’était pas l’acteur bankable que l’on connait aujourd’hui. Philadelphia, qui allait faire décoller sa carrière et lui valoir un oscar, ne sortirait pas avant fin 1993. Par conséquent, sa demande est également rejetée.
Le choix suivant sera également le dernier. Le dévolu des équipes de production se jette sur Bob Hoskins. Comme Mario il était européen. Hoskins venait en plus de s’illustrer dans Qui veut la peau de Roger Rabbit. Des personnages animés partagent l’affiche avec des acteurs en chair et en os mêlant les deux mondes ensemble. C’était ce que souhaitaient atteindre les producteurs avec Super Mario Bros. Le Film. Que demander de mieux ?
Une fois le premier rôle validé, tout s’enchaine rapidement. John Leguizamo est choisi pour le rôle de Luigi pendant que Dennis Hopper accepte le rôle de Koopa, après que les producteurs aient été rejetés par Arnold Schwarzenegger et Michael Keaton, leurs choix d’origine. C’est à partir de ce moment précis que tout commence à dégénérer.
Super déboires
Le script était constamment réécrit. Lorsque le tournage commence enfin dans une ancienne usine de ciment (clin d’œil volontaire ou non du quatrième niveau de Donkey Kong, le mystère reste entier) de Caroline du Nord en 1992, le script était passé entre les mains de plus de dix scénaristes ! Les changements étaient quotidiens. Ajoutez à ce mélange le couple de réalisateur, Annabel Jankel et Rocky Morton, qui étaient, apparemment à raison, conspués par l’équipe de tournage à cause de leur comportement arriviste et de leurs insultes constantes, et vous obtenez un vrai cauchemar. Pour couronner le tout, le tournage avait lieu pendant l’été et la Caroline du Nord est connue pour ses chaleurs insoutenables qui atteignent sans mal les 35° et des niveaux record d’humidité.
La version finale du scénario partait du postulat que la météorite qui s’était écrasée sur la Terre et avait décimé les dinosaures avait en fait créé une dimension parallèle dans laquelle les reptiles avaient évolué en créatures humanoïdes et vivaient dans la terreur. Le vil roi Koopa souhaitait fusionner les deux mondes. Il espérait ainsi devenir ainsi le seul et unique régent sur Terre. Pour ce faire, il avait besoin du morceau de météorite que gardait sur elle la princesse Daisy qui vivait parmi les humains. Sans se douter de ses origines ni de son rôle. Le roi envoie donc ses deux sbires, loin d’être les plus futés, capturer la princesse. Il se trouve qu’elle est la petite amie de nul autre que Luigi. Les deux frères partent donc à sa rescousse en traversant un portail situé dans les égouts de New York les envoyant dans l’autre dimension.
Super ambiance
Alors que sur le papier, le scénario faisait montre d’un certain potentiel, son exécution est totalement différente. Malgré les nombreuses références à la licence comme les Bob-Omb, les Goombas, les tenues rouge et verte et le Super Scope, le film n’a que très peu de rapport avec n’importe lequel des jeux de la série. De plus, le manque de communication entre les acteurs, les producteurs et les réalisateurs ont conduit au désastre que l’on connait.
La tension était telle que pour s’encourager à travailler Bob Hoskins et John Leguizamo buvait du whisky sur le plateau de tournage pratiquement entre chaque scène ! Cette dérive faillit même provoquer un accident le jour où un Leguizamo en flagrant état d’ébriété manque de renverser la camionnette utilisée dans le film. Autre anecdote qui illustre l’état d’esprit des réalisateurs : Rocky Morton qui trouvait que le costume d’un des figurants n’était pas assez sale pour servir les propos du film n’hésita pas à renverser son café bouillant sur ce dernier qui hurla de douleur. L’atmosphère n’était vraiment pas la meilleure.
Super échec
Malgré tout, Nintendo, était très au fait de l’ambiance de tournage. Elle savait que le film ne serait pas à la hauteur de ses attentes en termes de qualité. Mais elle continuait d’espérer qu’il générerait suffisamment de revenus grâce à la présence de Mario.
Finalement après des mois et des mois de travail acharné, Super Mario Bros. finit par atterrir dans les salles américaines le 28 mai 1993, puis le 23 juin 1993 en France, et fait un majestueux bide. Sur un budget estimé à 48 millions $ le film n’en rapportera que 21 millions sur toute sa durée d’exploitation en salles. Les critiques étaient perdues entre le manque flagrant de fil conducteur et la pauvreté du jeu d’acteur. Mais la plus grande question qui restait en suspens était : mais à qui se destinait ce film ?
Mais, aussi surprenant que cela puisse paraitre, Super Mario Bros. Le Film a fédéré quelques adeptes. Il a même son propre site web lancé en 2007 et riche en anecdotes, interviews et critiques du monde entier. Cet effort conduira le film à connaître une sortie en Blu-Ray en 2014.
Tous les acteurs qui ont participé à la production du film, surtout les regrettés Bob Hoskins et Dennis Hopper, citent Super Mario Bros. Le Film comme la plus grosse erreur de leur carrière. Les réalisateurs, quant à eux, ne sont plus jamais repassés derrière la caméra. Leurs exploits étant remontés jusque dans les hautes sphères de l’industrie. Quant à Nintendo, la malédiction semble se lever puisqu’en mai 2016, l’entreprise évoquait la possibilité de porter à nouveau ses licences sur grand écran. Espérons que ce soit pour le mieux, quoique les récentes adaptations ne soient pas des plus rassurantes.