Je suis très fan de Fire Emblem.
La preuve, je jouais avant même que la série de RPG tactique offre la possibilité de faire tomber en amour nos soldats et de faire de leur progéniture des enfants-soldats.
En fait, je me suis mis à la série dès qu’elle est arrivée en Amérique du nord. J’ai même acheté Path of Radiance dès sa sortie sur Gamecube (malheureusement pour mon fonds de pension, je l’ai échangé quelques années plus tard contre le vieux PS2 tout pété de mon ami, un échange que je regretterai jusqu’à mon dernier souffle).
Bref, j’aime beaucoup la série et c’est avec joie que j’ai accueilli l’annonce de l’arrivée du tout premier opus de la série en version anglaise sur Switch.
Mais est-ce que ça vaut toujours la peine, 30 ans plus tard?
Des améliorations notables
Bonne nouvelle: Nintendo ne se sont pas contentés de simplement traduire ce jeu sorti pour la première fois en 1990 au Japon.
J’avais peur que cette incursion dans la toute première aventure de Marth soit aride; j’avais déjà essayé de jouer à la version originale, avec Google Translate ouvert sur mon ordinateur, et ça n’avait guère été un succès.
Première découverte; ce premier Fire Emblem est beaucoup plus accessible quand il est dans une langue qu’on comprend!
Mais Nintendo ont également inclus quelques mises à jour qui rendront la vie plus facile aux joueurs habitués au gameplay beaucoup moins strict des versions les plus récentes.
On peut, à tout moment, créer un « signet » qui permet d’interrompre la partie et d’y revenir sans perdre de progression. Comme la création d’un signet n’interrompt pas la partie, on peut également s’en servir comme filet de sauvetage avant de tenter une stratégie risquée. Bref, c’est un save state, mais « permis » par Nintendo.
On a également inclus dans cette nouvelle version une fonction de retour en arrière, qui permet de revenir au début de n’importe quel tour précédent, si l’une des phases adverses a été particulièrement douloureuse.
De plus, on a ajouté des options pour accélérer le jeu; on peut accélerer le tour ennemi, ou tous les tours (nos unités se déplaceront alors plus rapidement). Un ajout plus que bienvenu quand on connaît le rythme glacial des jeunes (et moins jeunes) épisodes de la série.
Marth est moins ridé qu’on pense
J’ai également été surpris par la qualité de ce premier opus. Les premiers pas sont rarement les plus gracieux, et le défi était d’autant plus grand pour Fire Emblem, pionnier d’un genre qui était encore naissant à l’époque.
Pourtant, en jouant à Fire Emblem: Shadow Dragon and the Blade of Light, on réalise que les fondations de ce qu’allait devenir la série ont été posées dès ce premier épisode.
On retrouve tout ce qui fait le charme de la série (ou presque): des unités qui ont toutes leur propre identité (on réussit même à en rendre certaines assez charismatiques malgré les limites du NES), le triangle des armes (épée-hache-lance) qui rajoute une couche stratégique, la mécanique de création de liens entre les unités qui combattent côte à côte… bref, tout sauf le concubinage qui allait venir plus tard dans la série.
Ça ne veut pas dire que le jeu est sans ride, toutefois. Le système de gestion de l’inventaire est d’une lourdeur qui serait inexcusable aujourd’hui; impossible de gérer l’équipement de chacun entre les tours. Il faut soit transiter par le convoi ou échanger directement entre les unités.
Pareil pour l’achat d’armes chez les marchands; il faut se rendre directement chez le marchand, puis faire la distribution manuellement une fois sur la carte.
Graphiquement, on ne peut pas dire non plus que Fire Emblem: Shadow Dragon & the Blade of Light brille. La mémoire était plus que limitée sur les cartouches de NES, et avec plus de 50 personnages jouables, une trame sonore variée et un scénario étoffé pour l’époque, disons que ce n’est pas difficile de trouver à quel endroit les développeurs ont coupé.
Mais ce n’est rien de très grave, au final. Ça reste un jeu étonnament achevé pour l’époque, et le plaisir de découvrir les origines d’un classique dépasse largement les désagréments inhérents à l’âge.
Ce que j’essaie de dire, c’est que vous devriez faire un câlin à vos grands-parents quand ça redeviendra possible!
Pourquoi le vendre à part?
Reste une question plus difficile à éviter que les flèches de Jeorge; pourquoi Nintendo n’ont-ils pas inclus le jeu dans la sélection de jeux NES sur Switch Online, plutôt que de le vendre 8 dollars?
Bon, la réponse évidente est sûrement la bonne: pour faire plus d’argent. Fair enough, comme on dit en bon français.
Nintendo se défendra en disant que Fire Emblem n’est pas un jeu comme les autres: on a ajouté de nouvelles fonctions, et il s’agit d’une toute nouvelle traduction.
Les nouvelles fonctions, bien que pratiques, sont loin d’être inédites: la plateforme Switch Online propose déjà des save states. Je doute qu’on tente de nous convaincre que la possibilité d’accélérer les tours adverses vaut 8$.
On a probablement voulu absorber les coûts de la traduction. Bien sûr, il s’agit d’un travail un peu plus intense qu’à l’habitude.
Mais ce n’est pas non plus un exploit hors du commun. Les développeurs indies sont habitués de traduire leurs jeux dans plusieurs langues, et ils n’ont pas les moyens de Nintendo. The Messenger, par exemple, est disponible en 10 langues, du russe au chinois en passant par le français québécois… et il s’agit d’un jeu original, pas du rom d’un jeu de NES de 1990.
Aussi, pour une raison obscure que seule Nintendo connaît (mais dont les actionnaires se doutent), le jeu est disponible jusqu’au 31 mars 2021, où il sera alors retiré des étalages virtuels. Dans quel monde étrange vivont nous?
Au final, il vous revient de décider si 8$ vous semble une somme juste pour jouer aux toutes premières aventures de Marth. J’ai certainement déjà dépensé 8$ sur pire achat.
Mais on a quand même l’impression que Nintendo pousse le bouchon…