Jouer avec rien du tout… ou presque

 

Il existe plusieurs jeux de type “folklorique” dont les règles se transmettent oralement, et auxquels on peut jouer avec trois fois rien. Des jeux parfaits pour l’île déserte, la cellule de donjon, ou encore la visite imprévue chez mononc’ Roger qui s’étire un peu trop.

Je vous en propose trois, expliqués dans l’ordre du plus simple au plus complexe. Ils se jouent tous en 30 minutes ou moins.

(de 3 à 10 joueurs)

©Francis K. Lalumière

Matériel : Chaque joueur commence la partie avec une pièce de 25 ¢, deux pièces de 10 ¢, trois pièces de 5 ¢ et quatre pièces de 1 ¢. Comme les pièces de 1 ¢ sont disparues de la circulation canadienne depuis 2013, vous pouvez les remplacer par n’importe quels petits objets : des boutons, des boulons, des macaronis… (Prenez note que pour l’explication des règles, je continuerai de les appeler « pièces de 1 ¢ ».)

Déroulement : Le premier joueur est choisi au hasard et il place une pièce de son choix au centre de la table (habituellement une pièce de 1 ¢). Le joueur suivant doit lui aussi placer une pièce au centre de la table, mais s’il lui est possible de reprendre « de la monnaie » pour sa pièce (jusqu’à la valeur de sa pièce), il peut le faire.

Un exemple : le premier joueur joue une pièce de 1 ¢. Le deuxième joueur pourrait jouer lui aussi une pièce de 1 ¢, ou alors jouer une pièce de 5 ¢ et reprendre la pièce de 1 ¢ déjà en jeu.

Un autre exemple : il y a une pièce de 5 ¢ et trois pièces de 1 ¢ en jeu (pour une valeur totale de 8 ¢). Le joueur dont c’est le tour décide de jouer une pièce de 10 ¢ et de reprendre les 8 ¢ déjà en jeu.

Un joueur qui n’a plus de pièces est éliminé, et c’est le dernier joueur encore en vie qui remporte la partie.

L’idée est d’économiser ses coups : si je réussis à reprendre plusieurs pièces en échange d’une seule, je pourrai jouer plus longtemps. Malgré son unique règle (jouer une pièce et reprendre de la monnaie), ce petit jeu est difficile à maîtriser, et vous serez surpris de la profondeur que vous y trouverez. Personne n’arrive à jouer une seule partie sans demander un match revanche.

Même pas mononc’ Roger.

(de 7 à 15 joueurs)

C’est un jeu très connu, publié à maintes reprises avec une infinité de variations. Je vous présente ici le jeu de base dans son expression la plus simple.

©Francis K. Lalumière

Matériel : Il vous faut X objets identiques, X étant le nombre de joueurs (moins 1, puisque l’un des joueurs devra agir en tant que maître de jeu).

Un exemple : avec le nombre minimum de joueurs (sept), il vous faudra six objets identiques.

Ces objets peuvent être des cartes à jouer, des boutons, des pièces de monnaies, des cailloux, etc. L’important est d’en distinguer deux : une trace au marqueur sur deux pièces de monnaie, deux cartes noires parmi un groupe rouge, et ainsi de suite.

Déroulement : le maître de jeu distribue un objet à chaque joueur. Deux des joueurs recevront les objets marqués ou différents : ce sont les loups-garous, alors que les autres sont de simples villageois. Chacun doit garder son identité secrète ! Puis le jeu commence.

  • LA NUIT TOMBE ! Le maître de jeu demande à tous de fermer les yeux.
  • Le maître de jeu annonce que les loups-garous doivent ouvrir les yeux et (en gesticulant le plus silencieusement possible) s’entendre sur une victime parmi les villageois endormis. Le maître de jeu fait un signe de la tête pour indiquer aux loups-garous qu’il a bien noté leur choix.
  • Le maître de jeu demande aux loups-garous de refermer les yeux.
  • LE JOUR SE LÈVE ! Le maître de jeu demande à tous les joueurs (y compris les loups-garous) d’ouvrir les yeux, puis il annonce – sur un ton dramatique – qui a été dévoré durant la nuit.
  • La victime se retire du jeu et doit garder le silence jusqu’à la fin de la partie.
  • Les autres joueurs (y compris les loups-garous !) prennent alors une minute ou deux pour discuter afin de choisir l’un d’eux, qu’ils mèneront au bûcher. Les accusations de mauvaise foi sont encouragées. Le choix du village doit être unanime (sauf pour celui qu’on décide de brûler, bien sûr) et le maître de jeu peut forcer les joueurs à arrêter leur choix si les délibérations prennent trop de temps.
  • Une fois le « coupable » choisi, il révèle sa véritable identité en remettant au maître de jeu son objet secret. Les villageois pourront alors voir s’ils ont brûlé un loup-garou ou un villageois innocent !
  • Le cycle recommence avec une nouvelle nuit (et une nouvelle victime dévorée), suivie d’une nouvelle journée (et d’un nouveau « coupable » attaché au bûcher).

La partie se termine à la fin d’une journée par une victoire des villageois si les deux loups-garous ont été éliminés, ou par une victoire des loups-garous si le nombre de villageois a été réduit au nombre de loups-garous encore en jeu. (Rien ne sert de jouer jusqu’à ce qu’il ne reste aucun villageois : dès que leur nombre atteint le nombre de loups-garous encore en jeu, il est impossible pour le village de gagner.)

Bon appétit !

(de 2 à 6 joueurs)

©Francis K. Lalumière

Il s’agit aussi d’un jeu très populaire, connu sous une multitude de noms. Encore une fois, je vous présente ici la version la plus simple.

Matériel : Chaque joueur a besoin de six dés ordinaires (à six faces) et d’un verre ou d’un petit contenant opaque.

Déroulement : Chaque joueur utilise son verre pour brasser ses dés, puis le retourne sur la table. Les résultats sont secrets : chaque joueur peut regarder son jet de dés, mais doit s’assurer que les autres ne le voient pas. Le premier joueur est choisi au hasard, et il doit annoncer une quantité et un chiffre. Il pourrait, par exemple, annoncer « quatre 3 », ce qui signifie qu’il y aurait, autour de la table, au moins quatre dés qui montrent le chiffre 3.

Ensuite, à tour de rôle, chaque joueur se retrouve devant trois choix :

  • MISER : le joueur annonce soit un chiffre plus élevé (comme « quatre 5 », pour reprendre notre exemple), soit une quantité plus élevée (comme « cinq 3 »). S’il annonce une quantité plus élevée, il peut diminuer le chiffre (passer de « quatre 3 » à « cinq 1 », par exemple)
  • DOUTER : le joueur annonce qu’il met en doute la déclaration du joueur précédent. Tous les joueurs soulèvent alors leur verre pour révéler les jets de dés, et on compte ! Si le joueur qui doute a raison, le joueur précédent perd un dé. Si le joueur qui doute a tort, c’est lui qui perd un dé.

Un exemple : un joueur annonce « quatre 2 » et le joueur suivant déclare qu’il doute. On regarde les dés de tout le monde et on compte les 2. Il se trouve qu’il y en a six ! Le joueur qui doutait avait tort, et il perd un dé.

Un autre exemple : un joueur annonce « cinq 5 » et le joueur suivant déclare qu’il doute. On compte les 5 pour découvrir qu’il n’y en avait que trois. Le joueur qui doutait avait raison, et c’est donc le joueur précédent (qui a « menti ») qui perd un dé.

  • ACCEPTER : le joueur annonce qu’il accepte la déclaration du joueur précédent. Tous les joueurs soulèvent alors leur verre pour révéler les jets de dés, et on compte ! Si la déclaration du joueur précédent était exacte (ni plus ni moins), le joueur qui acceptait récupère un dé précédemment perdu.
Tous les joueurs brassent à nouveau leurs dés et on se remet à parler à tour de rôle, en commençant par le joueur qui vient de perdre un dé.

Un joueur qui perd son dernier dé est éliminé, et le dernier joueur en vie remporte la partie.
Ça roule !