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GabTheNostalgic – Champion Canadien de Just Dance

 

Du 17 au 19 février dernier avait lieu le ESWC Winter à Paris, en France. Plusieurs tournois y avaient lieu, notamment la Just Dance World Cup 2017. Ce jeu ne vous dit peut-être pas grand chose, mais il est de plus en plus populaire partout à travers le monde, faisant bouger et danser des milliers de joueurs et passionnés de musique. Lors de cette compétition, le Canada était représenté par un jeune Montréalais de 17 ans connu sous le nom de GabTheNostalgic. Gabriel est un étudiant au Collège Bois-de-Boulogne de Montréal en programmation. Joueur de Just Dance depuis 2012, son talent et son parcours international prennent une toute autre dimension lorsque l’on apprend qu’il est autiste. Une barrière qui ne l’a pas empêché de poursuivre ses rêves les plus fous.  Il a accepté de me recevoir en compagnie de ses parents afin de nous parler de son expérience.

Gabriel lors de la compétition de Just Dance World Cup 2017 en duel contre la représentante de l’Italie. Crédit vidéo : Ghyslain (Père de Gabriel) 

Jeux.ca : Gabriel, qu’est ce qui t’a attiré vers Just Dance? Pourquoi avoir choisi ce jeu?

Gabriel : Quand j’ai commencé à jouer à Just Dance, je ne faisais pas vraiment d’exercice sauf à l’extérieur. Mais lorsque mes parents ont perçu que j’avais peut-être un don en danse, ils se sont dit «Pourquoi pas lui offrir Just Dance et ça lui fera plaisir». Le titre ne me disait rien mais je voulais au moins me laisser une chance d’essayer le jeu et j’ai découvert au fil du temps un côté très intéressant dans les chansons et les chorégraphies.

Jeux.ca : Ils ont bien fait de te pousser dans cette direction de ce que je vois! Pensais-tu qu’après presque 5 ans tu viendrais à voyager ailleurs dans le monde pour faire des compétitions internationales?

Gabriel : Ça, je ne l’avais jamais vu venir!

Jeux.ca : Quand tu as su que tu allais représenter le Canada à Paris cet hiver, comment as-tu réagi?

Gabriel : J’ai appris la nouvelle lorsque j’ai été voir la liste des participants ayant participé aux qualifications en ligne et lorsque j’ai vu ma photo je me suis dit: «Oh mon dieu… Je suis dans les finalistes…»

Jeux.ca : En tant que parents, comment avez-vous réagi en apprenant la nouvelle?

Julie (mère de Gabriel) : Disons que Gabriel nous a “un peu beaucoup” mis sur un fait accompli. Quand il disait qu’il commençait à jouer à Just Dance, même nous, en tant que parents, on se trouvait moins coupable qu’il bouge en même temps de jouer aux jeux vidéo que juste être assis sur le divan. Je n’ai rien contre les autres jeux, mais Gabriel aimait ça bouger.

Jeux.ca : Je suppose qu’aux yeux de parents, ça passe mieux quand son enfant bouge et danse plutôt que de rester assis.

Julie : Quand il doit boire plusieurs bouteilles d’eau et qu’il monte me voir en disant: «Maman j’ai sué», on se sent moins coupable de le laisser jouer devant un écran. Mais durant les qualifications, qui ont durés plusieurs semaines, en tant que parent, on essaie d’embarquer dans les rêves et la motivation de nos enfants. On l’encourageait et à chaque semaine il nous parlait de son score et il en était fier. Lorsqu’il a été qualifié, il a mentionné à quelques reprises qu’il était le champion du pays. On aurait aimé le savoir d’avance mais on ne s’est pas arrêté à ce détail à ce moment-là.

Il faut savoir aussi que la participation de Gabriel n’a été confirmée que 2 semaines après l’annonce des pointages finaux. En effet, le meilleur pointeur sur la liste en ligne n’était pas Gabriel initialement, mais plutôt un jeune Brésilien. Suite à la disqualification de ce dernier, les parents de Gabriel ont dû fournir rapidement des preuves de citoyenneté canadienne avant de tomber dans une autre semaine d’attente, incertains du sort de ce dernier.

Gabriel à son arrivé devant le stade du ESWC 2017. Crédit photo : Ghyslain (Père de Gabriel)

Julie : C’est bien beau savoir que Gabriel allait possiblement être pris en main par l’organisation de Ubisoft et du ESWC avec le billet d’avion payé, hébergement, etc., mais celui qui devait l’accompagner, non. Aussi, financièrement, c’est quelque chose qui n’était pas prévu dans notre budget. Nous revenions tout juste de voyage le samedi et le mardi, il partait pour Paris. Ça fait de belles étampes dans un passeport! *rires*

Ghyslain (père de Gabriel) : Disons que je suis devenu une régie mobile. Autant que j’ai filmé avec mon cellulaire, autant que je faisais du direct sur facebook. La famille était capable de suivre ce qui se passait la-bas.

Jeux.ca : Comment avez-vous trouvé l’idée qu’une organisation du monde du jeu vidéo puisse faire ce genre d’événement physique?

Ghyslain : Ce qui m’a surpris d’abord et avant tout, c’est que Gabriel ne nous avait pas dit qu’il faisait partie de cette compétition. Nous savions qu’il jouait au jeu, mais lorsqu’il est venu me voir avec la feuille montrant qu’il était le premier au Canada, je ne pose pas plus de questions. J’ai été consulter le site web de la compétition pour apprendre qu’il devrait se rendre à Paris. Je lui ai demandé: «Et quand comptais-tu nous en parler?» *rires*

Jeux.ca : Je peux comprendre l’hésitation de Gabriel d’en parler car il s’agit d’une seule personne sélectionnée dans tout le pays pour aller là-bas. Les probabilités sont quand même minces et on y croit parfois plus ou moins.

Ghyslain : Gabriel s’est inscrit sans vraiment savoir ce qu’il vallait ou savoir s’il pouvait y arriver. C’est en essayant qu’il est rendu là.

Julie : Pour répondre à la question de l’organisation et de l’événement international, on se demande toujours «Est-ce vrai? Est-ce bric-à-brac?». Nous avons fait notre petite enquête et j’ai trouvé que le tout était très sérieux, bien organisé. Notre contact, Julien Lopez (gestionnaire de projet ESWC), répondait rapidement à toutes nos questions avant même que Gabriel ne soit là-bas. C’était très bien et très clair.

Ghyslain : On a du prendre un recul car nous n’arrivions pas à croire que ça pouvait avoir une telle ampleur. Inviter 15-20 personnes d’à travers le monde pour venir ici compétitionner, c’est toute une logistique. Le représentant d’Australie a fait environ 30 heures d’avion, on va le chercher loin pour ça!

Julie : Nous pouvions suivre la compétition via Twitch, avec les commentaires et analystes pour les jeux et les joueurs. Même moi, ça m’a permis de découvrir d’autres plateformes de jeu et univers.

Ghyslain : Fait amusant : un des commentateurs pendant le tournoi a dit, en parlant de Gabriel : «Hey, il vient de Montréal! Il vient de chez nous!»

Gabriel est un jeune homme de 17 ans qui est aux études. Un jeune homme comme les autres à un petit détail près : il est autiste. Sa principale problématique est au niveau de la socialisation avec les autres, explique sa mère. “Il était très limité avec les autres à ce niveau mais en étant avec la communauté de Just Dance, ça lui permet de communiquer avec d’autres, d’échanger, de partager une passion commune. Quand il est arrivé le mercredi à Paris, Ghyslain m’a immédiatement écrit: «C’était si beau de voir les jeunes ensemble, ça n’a pas de prix de le voir aller avec des passionnés comme lui». Ça m’a fait plaisir à entendre.”

Lorsque l’on demande à Gabriel ses commentaires sur l’événement lui-même, il cherche longuement ses mots, comme s’il était incertain de pouvoir résumer le tout en quelques phrases.

Gabriel sur l’une des scènes en compagnie des autres danseurs du Just Dance World Cup 2017. Crédit photo : ESWC

Gabriel : J’ai vu à quel point c’était immense. Il y avait plusieurs jeux et scènes, l’espace Just Dance avec des écrans, des endroits pour se pratiquer entre les compétitions, des bouteilles d’eau. J’ai été très bien reçu.

Jeux.ca : Et ton moment marquant de ce voyage?

Gabriel : Lorsque tous les danseurs étaient ensemble. La fraternité et la camaraderie entre les danseurs. C’était génial.

Jeux.ca : Tu as dû rencontrer d’autres joueurs connus, des idoles?

Gabriel : Bien sur, je m’attendais à voir une des championnes que j’ai suivi longtemps, Dina (Vice championne du monde à l’ESWC Just Dance 2016 et triple championne de France de 2015 à 2017). J’ai pu la rencontrer en personne malgré le fait que l’on parlait seulement par internet. C’était super.

Ghyslain : J’ai vu l’émotion et la gêne qu’il a vécu en voulant aller se présenter aux deux meilleurs joueurs du monde. C’est magique.

Jeux.ca : Tu as bien performé aussi lors de la compétition en général. Comment as-tu trouvé la compétition en elle-même? Étais-tu nerveux?

Gabriel, lors de son entrevue avec Jeux.ca, est tout sourire de partager son expérience. Crédit Photo : Jeux.ca

Gabriel : Oui, je dirais que… oui. *rires* Je suis redevenu à l’aise après la première présence sur scène. Je me suis concentré sur la danse et j’ai encouragé les autres participants aussi lors des affrontements.

Jeux.ca : Les gens sont d’abord là pour s’amuser. Ils sourient et s’amusent sur scène et en jouant, malgré la compétition mondiale. Tu as même été invité à danser sur la scène principale juste avant la grande finale avec UbiMouss (Développeur de communauté chez Ubisoft pour le jeu Just Dance) en te rendant hommage avec ton autisme. Était-ce important pour toi que l’on en parle ainsi devant le public?

Gabriel : Il m’en avait parlé à l’avance, bien sûr, avant de se lancer ainsi sur scène.

Ghyslain : Il nous avait demandé s’il avait notre accord pour faire un petit volet devant le monde et j’ai posé la question à Gabriel, car c’est de lui dont il s’agit et il était d’accord alors on y va avec la famille. J’ai bien aimé aussi la façon dont ce fut présenté, en mettant à l’avant le côté social. Il faut dire que nous étions tous au même hôtel aussi, alors le jeudi Denzal, le champion australien s’approche de nous et dit: «C’est toi Gabriel? J’ai lu ton entrevue sur le site et je voulais te dire que moi aussi, je suis autiste.» Un troisième finaliste a lui aussi avoué l’être.

Jeux.ca : C’est dans ces moments que l’on se rend compte que les barrières, c’est nous même qui les mettons.

Julie : Ce jeu inclut tout le monde. Il n’y en a pas de barrière, de religion, de nationalité, de différences, de sexe. Tout le monde est le bienvenu peu importe ton âge. C’est ça qui est le fun.

Ghyslain : C’est le seul “sport” où les compétiteurs s’entraînent ensemble. Ils sont tous devant le même écran ou coach et dansent sur la même chorégraphie et s’aident dans les mouvements.

Les concurrents ont décidé avant la compétition de se réunir et faire un flashmob devant l’hôtel de ville de Paris pour danser tous ensemble. Des fans ont joint les participants et c’est plus de 50 personnes qui ont dansé au travers de la ville, guidé par Dina.

Ghyslain : C’était très amusant de voir les gens chercher à comprendre le système de billets pour le transport en commun et Dina prenait le temps d’expliquer à chacun. Heureusement que la grande majorité des gens parlent l’anglais, donc nous pouvions communiquer entre nous.

Les danseurs, tout au long du trajet, recréaient par coeur les chorégraphies du jeu grâce à un petit système de son bluetooth porté par l’un des concurrent qui diffusait les chansons du jeu. Tout au long du tournoi, le public dansait, dans la foule et les estrades, avec les joueurs au rythme des chansons.

Flashmob organisé par les concurrents du Just Dance World Cup 2017 avec des fans dans les rues de Paris quelques jours avant le tournoi. Crédit vidéo : Ghyslain (père de Gabriel)

Un merci particulier à Gabriel et à ses parents pour le temps accordé et l’entrevue. Vous pouvez suivre Gabriel via Twitter : https://twitter.com/GabTheNostalgic

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