Adam Koebel, maître de jeu aux multiples chapeaux

Si le jeu de rôle sur table fut jadis confiné aux sous-sols ou à une activité pratiquée en toute discrétion, la culture de l’internet atteste aujourd’hui d’un retour du balancier avec une explosion de parties diffusées en ligne et de l’émergence de personnalités du web se revendiquant rôlistes.

Alors qu’en février dernier, je profitais de la campagne de sociofinacement de Matt Colville pour dresser le portrait rapide d’une figure du genre, je propose cette fois d’appliquer l’exercice à Adam Koebel (aka Skinnyghost), un Ontarien anglophone queer, photographe, designer de jeu et maître de jeu professionnel, pour ne nommer que ses plus grandes étiquettes.

Koebel
©Sage Kobold Productions

Commençons avec l’essentiel. Adam Koebel est le codesigner de DungeonWorld, un jeu de rôle sur table de fantasy «propulsé par l’Apocalypse» financé par kickstarter et qui a raflé plusieurs prix dès sa sortie en 2012 (un article dédié à DungeonWorld est prévu ce printemps). Koebel a depuis entretenu cette notoriété jusqu’à devenir une sorte d’influenceur sur les réseaux sociaux. Si ses comptes Instagram et Twitter lui servent de plateformes pour partager sur la photographie et ses états d’âmes, c’est davantage sur des sites de téléversement en continu que les différentes communautés ludiques le retrouvent. Koebel fait partie du programme de partenariat de Twitch où il tire des revenus de «let’s play» de jeux vidéo et de contenus divers, mais c’est sans doute ses parties de jeu de rôle en ligne en direct et son implication sociale à mi-chemin entre la scène amateur et professionnelle qui suscite le plus d’intérêt chez les rôlistes.

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© RollPlay Presents: a 5E Roundtable Discussion (EP1) Adam Koebel, Mike Mearls, Matt Mercer et Matt Colville.

En effet, Koebel est depuis mars 2015 un «maître de jeu résident» chez Roll20, poste qui consiste notamment à promouvoir ce programme de table virtuelle en pleine action. Maintes campagnes de plusieurs systèmes différents s’y sont déroulées. Ces parties peuvent se retrouver facilement sur YouTube sous l’appellation «RollPlay», tandis qu’un compte Patreon cimente depuis peu avec ses mécènes une relation de design collaboratif avec un univers Sci-Fi en construction. Il convient de préciser qu’il s’agit de jeu de rôle sur table distanciel, c’est-à-dire via webcams (comme la série «Aventures» du Joueur du Grenier) et non filmé en présentiel à l’instar de Critical Role. Bien qu’il aime jouer à Donjons & Dragons depuis qu’il l’a découvert en 1993, Koebel multiplie les efforts pour donner de la visibilité à d’autres systèmes méconnus. Il s’intéresse entre autres à des jeux souvent qualifiés de l’approche «narrativiste» où les mécaniques de jeu s’intéressent plus particulièrement au développement des personnages et aux moyens de susciter une histoire plus émergente. Koebel en discute autant avec des youtubers moins populaires qu’auprès de panels plus notoires, par exemple aux côtés de Matthew Mercer ou Mike Mearls de Wizards of the Coast (photo). Avec ce curriculum, Adam Koebel incarne ce que plusieurs pointent comme étant un maître de jeu professionnel, statut qui suscite de nombreuses questions dans la communauté et auxquelles l’artiste se fait plaisir de répondre sur sa propre chaîne YouTube.

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Musique classique en introduction, veston et cravate, Koebel campe le rôle du professeur de «gamemastering», cet art d’être un bon maître de jeu. La liste de lecture «Office Hours» consiste à répondre hebdomadairement en une heure environ à des questions en lien avec les jeux de rôle sur table que le public peut lui laisser à un endroit précis sur sa page personnelle. Koebel donne des pistes de réflexions pertinentes, mais somme toute de nature plus improvisées ou personnelles comparées à ce que Matt Colville fait avec «Running the Game».

Il y aurait évidemment plein d’autres choses à dire sur Adam Koebel, mais le portrait demeurerait lacunaire sans souligner son dévouement en tant que représentant et défenseur de la communauté LGBTQ+. Koebel assure un espace «socially aware» dans tout ce qu’il touche et refuse de se taire face à des discussions ou des situations qui pourraient léser quiconque en fonction de ses orientations sexuelles. Dans une ère de toxicité du web, d’intolérance et de préjugés, un chevalier comme Koebel est plus que bienvenue; il est nécessaire.

Pour retrouver le matériel d’Adam Koebel, son site web offre un bon point de départ, puisqu’il rassemble ses adresses: http://www.adam-koebel.com/

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